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Exploitation des données : situation actuelle et possibilités en agriculture

Par Jane Robinson

Publié le 26 avril 2024 • 7 min de lecture

L’éventail des données disponibles touchant l’agriculture, et en particulier la production agricole, au Canada ne cesse de s’élargir, mais cette mine d’information est mal exploitée.

Depuis qu’il y a production alimentaire, il y a des données. Elles n’ont jamais manqué : qu’il s’agisse de notes sur le rendement des cultures, les coûts et la météo griffonnées dans un calepin ou des données générées automatiquement par la majorité des machines agricoles, l’information n’attend que d’être exploitée pour la mesure, l’évaluation et même l’amélioration de la productivité et de la rentabilité en agriculture.

Robert Saik s’intéresse aux données depuis plusieurs décennies. Ayant grandi sur une exploitation agricole mixte dans le nord-est de l’Alberta, il a étudié l’agriculture à l’Université de l’Alberta et acheté son premier ordinateur au début des années 1980. « J’ai toujours cherché à utiliser la technologie pour trouver de nouvelles solutions », affirme M. Saik, agrologue de profession, entrepreneur chevronné, conseiller en agriculture et auteur.

Il a été témoin du foisonnement des données disponibles touchant l’agriculture, et en particulier la production agricole, au Canada, mais selon lui cette mine d’information est mal exploitée.

« Je suis déçu de la manière dont les données sont utilisées dans le domaine de l’agriculture, confie M. Saik. Le bassin de données à notre disposition est vaste, mais disparate. Nous disposons des données des stations météorologiques et de renseignements sur le sol, l’humidité, les silos à grain, les engrais et les produits chimiques, mais rien n’est inter relié. »

Selon lui, il s’agit d’une énorme lacune.

M. Saik admet qu’en entamant la conception d’une solution d’agrégation de données avec sa première entreprise, Agri-Trend – l’une des premières entreprises de données sur l’agriculture en ligne –, il nourrissait l’espoir que sa plateforme constituerait un guichet unique.  Si l’interopérabilité des données (soit leur transfert et leur intégration entre unités fonctionnelles différentes, par exemple différentes machines agricoles) continue de poser problème, de nouvelles possibilités se profilent à l’horizon.

Nouvelles voies prometteuses

L’interfonctionnement et l’intégration des données constituent une avenue féconde dans le domaine hautement entrepreneurial de l’agriculture, mais la manière d’atteindre ces objectifs n’est pas encore claire.

M. Saik note l’émergence d’un nouveau champ professionnel lié aux données : l’intégration des technologies agricoles. Certaines écoles d’agriculture canadiennes ont commencé à offrir le programme de certificat.

« À mon avis, si l’on veut commencer à rationaliser les données et en tirer le maximum, nous devons les extraire de différentes sources et les regrouper dans un seul système, peu importe leur provenance, affirme M. Saik. C’est exactement ce que les intégrateurs (ou interprètes) de technologies agricoles pourront faire à l’échelle de l’exploitation. »

Pour illustrer le manque criant de coordination des données, M. Saik décrit la difficulté qu’il a eue, il a plusieurs années, à transférer le système hydraulique du tracteur d’un cultivateur à celui d’une autre marque. L’incompatibilité des pièces a fait fuser un jet d’huile hydraulique, dégât qui aurait pu être évité s’il existait un adaptateur.

« Aujourd’hui, nous sommes symboliquement encore couverts d’huile hydraulique, se désole-t-il. Les données ne manquent pas, mais il n’existe aucun lien entre elles, de sorte qu’il demeure extrêmement difficile d’atteindre l’interopérabilité. »

Le potentiel des données

M. Saik ne cache pas sa déception quant à la manière dont les données sont utilisées en agriculture, ni son enthousiasme face aux possibilités qui pourraient émerger si l’information était déployée pour faire progresser le domaine.

L’une de ces possibilités repose du côté de la consommation : les données pourraient servir au suivi et à l’attestation de la durabilité de la production alimentaire.

« En analysant la santé des sols, l’efficacité de l’utilisation de l’eau, le bilan des émissions de gaz à effet de serre et la viabilité d’une exploitation, nous pouvons déterminer son indicateur de durabilité, explique M. Saik. En regroupant ces données, nous pourrions démontrer aux consommateurs la durabilité de nos exploitations. »

Il voit aussi beaucoup de potentiel dans les données financières en temps réel. « Imaginez ceci : une appli qui analyserait les données pour générer un portrait de votre situation tout au long de l’année afin de vous permettre de faire des choix plus éclairés. »

L’objectif premier est de permettre aux exploitations de surveiller les paramètres qui comptent pour eux afin qu’ils puissent adapter leurs opérations en temps réel, qu’il s’agisse de la gestion de leur flux de trésorerie ou de l’évolution de leur stratégie de marketing au fil des changements météorologiques.

Multiplier les capacités

Pour l’avenir, M. Saik entrevoit trois principaux volets d’exploitation des données agricoles : la durabilité, le marché du carbone et la transparence.  « Est-ce possible de mesurer sa durabilité ? Qu’est-ce que ça veut dire, exactement ? Comment les données peuvent-elles servir sur le marché du carbone ? Enfin, quelles sont les attentes des consommateurs en matière de transparence en production alimentaire ? »

Les données peuvent également mettre en valeur l’apport des exploitations agricoles, des biens et services qu’elles fournissent jusqu’à leurs efforts de réduction et d’élimination des gaz à effet de serre.

Le prochain objectif pour M. Saik : extraire davantage de valeur des données en exploitant l’intelligence artificielle (qu’il appelle « intelligence amplifiée »). Sa toute dernière entreprise, VisorPROMD, accélère le traitement des demandes de service et de soutien technique des entreprises du secteur de la vente de machinerie agricole. « Je cherche à libérer le potentiel des données en les mettant en relation avec l’intelligence artificielle. À mon avis, c’est extrêmement prometteur. »

Chaque exploitation génère une quantité prodigieuse de données. Selon M. Saik, certaines d’entre elles sont utilisées, à profit, pour le stockage des céréales, le guidage automatique et les systèmes de localisation GPS, tandis que d’autres servent à peine. « Nous testons encore le sol comme le faisaient nos grands-parents : en prélevant des échantillons que nous envoyons à un laboratoire pour analyse. Je suis convaincu que nous pouvons faire mieux en utilisant la technologie à notre disposition. »

Le conseil de M. Saik aux exploitations qui ne savent pas trop comment profiter davantage des données qu’elles ont en main ni comment les transformer en résultats concrets :

« Embauchez une personne apte à regrouper toutes vos sources de données de manière à ce qu’elles vous soient utiles, dit-il. Ou alors, proposez votre exploitation comme lieu de recherche ou d’expérimentation. Vous en retirerez des connaissances qui vous permettront de mettre vos données à profit. »

Le présent article vise à offrir des renseignements généraux seulement et n’a pas pour objet de fournir des conseils juridiques ou financiers, ni d’autres conseils professionnels. Veuillez consulter un conseiller professionnel en ce qui concerne votre situation particulière. Les renseignements présentés sont réputés être factuels et à jour, mais nous ne garantissons pas leur exactitude et ils ne doivent pas être considérés comme une analyse exhaustive des sujets abordés. Les opinions exprimées reflètent le jugement des auteurs à la date de publication et peuvent changer. La Banque Royale du Canada et ses entités ne font pas la promotion, ni explicitement ni implicitement, des conseils, des avis, des renseignements, des produits ou des services de tiers.

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